TEXTES
Mes histoires en peinture, se construisent sur des bouts de mon quotidien, mon intimité, mes impressions du monde. Parfois, elles s’imposent comme des urgences. De celles qu’il faut régler d’un jet. D’autres mûrissent plus lentement mais reviennent en boucle, sorte d’impossible à éviter.
Face à ces surgissements, je n’ai pas de mode d’emploi car tout est toujours en mouvement. Le hasard des rencontres, un évènement ou le banal de la journée, prétextes à mes réalisations, se regardent autrement dans l’imprévu de la matière, l’accident de la ligne, l’étalement de la couleur. La couleur c’est comme le sang, ça circule.
Une œuvre, c’est pour moi une conversation entre le dehors et le dedans des choses. C’est une tentative pour retenir dans la lumière, l’éphémère, le périssable, le mouvement du quotidien qui sans cesse échappent……Une histoire se raconte malgré moi.
Tout est toujours remis en question : le sentir pleinement, l’existence des choses, le clair et l’obscur. Quelque chose se répète mais jamais à l’identique sur une route de dépôts palpables. Créer, c’est accepter d’entrevoir des aspects inattendus dans les formes du monde.
L’humain se distingue d’un quelconque objet. Chacun est singulier et nous n’échappons pas à la pourriture de la chair. Ce que nous cherchons à fixer, à figer, à limiter est en fait insaisissable et sans cesse nous échappe.
Plaire… Etre vu… Etre regardé… De tout temps le corps a été l’objet d’une représentation normée qui se posait comme standard esthétique du beau. Dans le monde surmédiatisé qui est le nôtre, la spirale du désir de séduction atteint des sommets. L’enveloppe corporelle est devenue le centre de toutes les préoccupations. Et dans cette quête effrenée, le corps doit pour plaire se plier à toutes sortes de critères de séduction standardisés. Notre regard ne cherche plus la vérité dans l’autre, mais la conformité à une image devenue le nouveau canon de beauté. Et peu à peu chacun de nous se met à souffrir de ne pas savoir ressembler à cette image projetée partout.
Cette vision exclusive et réductrice du beau est finalement devenue un voile jeté sur le vivant. Mais ce que l’on masque, ce que l’on veut cacher resurgit toujours derrière les apparences. L’usure du temps rend palpable la fragilité de l’être et met à nu la part monstrueuse de ce corps qu’on voudrait modéliser comme un objet. Et bien plus encore, elle nous oblige à faire face à ce sentiment qu’on redoute au plus profond de nous : la peur de la mort.
[2007]